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Supernature, 20 ans de sortilèges électroniques et de fièvre verte

Vingt ans déjà que Supernature a glissé sur nos nuits comme une bête élégante, mi-humaine mi-lumière, surgissant d’un monde où les synthés respirent et où la sensualité devient une température. Goldfrapp n’a pas seulement composé un album : ils ont ouvert une porte vers une forêt artificielle, faite de pulsations, de magie et d’audace. Aujourd’hui encore, Supernature brille comme un sort, un vert émeraude qui palpite au creux du ventre. Le cocktail qui en naît n’est pas un hommage : c’est une transmutation. Une alchimie liquide où le disque trouve un nouvel éclat, vibrant et vivant.

La fièvre selon Goldfrapp

En 2005, Alison Goldfrapp semble flotter à quelques centimètres du sol. Après le succès feutré de Black Cherry, elle revient avec une envie irrésistible d’incandescence. Supernature est un album qui ne marche pas : il avance d’un pas félin, presque trop gracieux, trop sûr de lui. La pop s’y fait sorcellerie, la disco devient un terrain de chasse, l’électro un parfum capiteux.

La voix d’Alison glisse, siffle, supplie, domine. Les basses caressent les chevilles. La production scintille comme une peau humide sous des lasers verts. Tout est moiteur, hypnotisme, promesse. Les chansons parlent de métamorphoses — d’humains qui deviennent animaux, de désirs qui deviennent paysages, de murmures qui deviennent énergie pure. Ooh La La, Ride a White Horse, Number 1 : chaque morceau est un geste, un souffle, une griffure. Cet album a la couleur d’un poison délicieux, d’un fruit trop mûr, d’un vert qui clignote comme un œil de créature dans la pénombre. L’écoute est une accélération lente : un frisson qui s’installe et refuse de partir.

Quand la forêt électronique devient un cocktail

Pour traduire Supernature en verre, il fallait un alcool qui glisse comme un rayon laser : le gin s’est imposé, botanique, nerveux, chargé de parfums végétaux. Autour, la nature devait muter : basilic pour l’érotisme herbale, kiwi pour la volupté acide, sirop de sucre noir pour la profondeur presque animale.

Et puis, cette trace lumineuse, ce vert phosphorescent qui traverse l’album de bout en bout — il fallait le faire vivre dans le verre. Une pointe d’absinthe, non pour l’ivresse mais pour le mystère. Cette note, à peine une ombre, est la créature tapie derrière Let It Take You. Elle colore l’ensemble d’une aura indéfinissable, comme un halo au-dessus du sol. Le shaker devient une clairière mécanique. On y enferme le basilic et le kiwi comme deux instincts qui s’affrontent, puis on secoue jusqu’à ce que la magie opère, jusqu’à ce que la couleur s’illumine et que la pulpe devienne danse.

On attrape un verre long, transparent comme un lac nocturne. Dans le shaker, quelques feuilles de basilic sont écrasées — un geste lent, presque sensuel, un froissement vert qui rappelle l’ouverture de Utopia. On ajoute le gin, le kiwi écrasé, le citron vert pour la morsure, puis une larme d’absinthe qui file comme un serpent lumineux.

On secoue longuement : Supernature n’est pas un album rapide, il est profond. Le rythme doit s’imprimer dans les poignets. Quand le métal se couvre de froid, on verse dans le verre et le liquide apparaît : vert, vif, presque irréel. On ajoute un trait d’eau gazeuse, juste assez pour faire respirer le cocktail comme une créature qui s’éveille. Une feuille de basilic flotte à la surface, à la manière d’un talisman.

Boire l’album

On boit Green Pulse comme on traverse Supernature : avec abandon. La première gorgée est fraîche et végétale, un murmure d’herbes froissées. Puis vient le kiwi, pulpeux et acidulé, qui roule sur la langue comme un synthé glissant dans Number 1. Le gin s’installe au milieu du verre, droit mais parfumé, et l’absinthe laisse en arrière-goût un voile mystérieux, une sensation presque lumineuse.

Le meilleur moment pour le déguster ? À l’entrée de la nuit, quand tout semble encore possible. Entre Ride a White Horse et Slide In, lorsque la fête n’est plus une promesse mais un enchantement. Vingt ans après, Supernature continue de pulser sous la peau. Green Pulse en est l’émanation liquide : une fièvre verte, une métamorphose en bouteille, une invitation à se laisser happer encore une fois par la magie.


Goldfrapp : Supernature – 20th anniversary (Mute records)

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