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Bob Sinclar contre Bob Singlar : la star attaque le sanglier

Le DJ star poursuit un petit vigneron du Var pour une cuvée baptisée “Bob Singlar”. Une querelle de consonne qui tourne à la satire nationale — surtout quand on se souvient que le pseudonyme du DJ vient, lui aussi, d’un personnage de fiction.

C’est une histoire à la française, où l’ego, le droit et le terroir s’entrechoquent avec panache. D’un côté, Bob Sinclar, alias Christophe Le Friant, DJ planétaire, figure du dancefloor et ambassadeur autoproclamé de la “Love Generation”. De l’autre, Maxime Gamard, vigneron au Domaine de la Mongestine, dans le Var, qui produit depuis près de dix ans une cuvée naturelle baptisée Bob Singlar. En occitan, singlar signifie “sanglier” — un hommage aux collines qui entourent le domaine, pas aux soirées électro d’Ibiza.

Mais le nom a déplu. Le DJ estime qu’il y a confusion et que cette cuvée nuit à son image de marque. Par la voie de ses avocats, il réclame l’arrêt de la commercialisation et des dommages et intérêts. Le vigneron, médusé, rappelle que sa cuvée existe depuis des années sans jamais avoir fait danser la moindre confusion. Pourtant, la procédure suit son cours, et l’opinion publique s’enflamme. D’un côté, les partisans du droit des marques ; de l’autre, ceux du bon sens et du terroir.

Et voilà que l’affaire prend une tournure délicieusement ironique. Car le pseudonyme “Bob Sinclar” n’appartient pas vraiment à celui qui le porte : il vient du film Le Magnifique (1973) de Philippe de Broca, où Jean-Paul Belmondo incarne François Merlin, un romancier maladroit s’évadant de son quotidien en rêvant d’être un espion irrésistible : Bob Saint Clar. Le DJ a donc bâti sa carrière sur un nom de fiction, né d’une parodie. Par exemple, au hasard… James Bond ? Aujourd’hui, il tente d’en défendre la pureté face à un vigneron dont le vin, lui, existe bel et bien. La mise en abyme est parfaite : un personnage inventé devenu marque réelle, attaquant un nom inspiré d’une langue régionale.

Le fond du litige

Sur le plan juridique, le débat est plus complexe qu’il n’y paraît. Le pseudonyme Bob Sinclar est bel et bien protégé par une marque déposée. Mais encore faut-il démontrer qu’un consommateur moyen pourrait confondre un vin artisanal du Var avec une marque associée à la musique électronique.

Le Domaine de la Mongestine peut de son côté invoquer l’antériorité d’usage et la différence de secteur d’activité — deux arguments solides en matière de droit des marques. En clair, si Bob Sinclar veut faire interdire le Bob Singlar, il devra prouver que le vin détourne sa notoriété à des fins commerciales. Or rien, ni dans l’étiquette ni dans la communication du domaine, ne va dans ce sens.

Sur les réseaux, la France s’amuse. “Love Generation, pas litige !” résume un commentaire, entre deux gifs de sangliers dansants. L’affaire dépasse la plaisanterie : elle symbolise la tension entre le monde des marques et celui du vivant, entre le branding global et la liberté d’un mot occitan. Et peut-être aussi une époque où l’image vaut plus cher que la terre.

Belmondo, Bob, Bruno !

Belmondo, amateur de bons crus et de clins d’œil, aurait sûrement levé un verre à cette farce juridique. Et puisqu’on parle de vin, sachez qu’il est encore possible de trouver quelques bouteilles de Bob Singlar à Paris, chez Bruno, à la Cave du Ballon Rouge. C’est un lieu chaleureux où les débats sur la “propriété intellectuelle du raisin” s’arrosent souvent d’un verre de rouge bien vivant. Bruno, lui, refuse de choisir un camp : il sert du Singlar en musique, “parce que ça groove mieux qu’un procès-verbal”. C’est ce qu’on appelle un accord parfait!


La Cave du Ballon rouge – 4 rue Vicq-d’Azir, 75010 Paris

Domaine de la Mongestine – RD 561, 83560 Artigues

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