Le 5 décembre 2025 marque la sortie d’Unclouded, le quatrième album studio (cinquième si l’on compte l’album “perdu” Unfold) de Melody Prochet, alias Melody’s Echo Chamber. Après des années d’errance sonore, de renaissance et de résilience, ce disque apparaît comme un manifeste de légèreté consciente, un retour à la terre, au souffle, à l’évidence. Dans le communiqué de presse, Prochet parle d’un tournant : « the more experience I have of living, the deeper I love life and the less I need to escape » — « plus mon expérience de la vie grandit, plus j’aime la vie et moins j’ai besoin de m’échapper ». Unclouded n’est pas un disque de fuite, mais un disque de présence.
Dès les premières notes de “The House That Doesn’t Exist”, l’auditeur est plongé dans un univers flottant : guitares diaphanes, basse douce, percussions retenues et voix aérienne comme un souffle suspendu. Le ton est donné : l’alchimie rêveuse propre à Melody’s Echo Chamber est là , intacte, mais avec une clarté nouvelle. Comme le dit Pitchfork, l’album « glints like gossamer: cinematic dream-rock soundscapes, muted explosions of fuzzed-out bass, and coiled percussion wrapped in reverberant, jangling guitar » — « brille comme une gaze : paysages sonores de dream-rock cinématographique, explosions feutrées de basses fuzz, percussions entortillées sur des guitares réverbérées et tintinnabulantes ». Ce son fait l’effet d’un voile léger qui flotte, prêt à s’envoler, fragile et magnifique.
Mais derrière cette douceur se cache une volonté de réécriture. FarOut Magazine note qu’avec Unclouded, l’artiste ouvre « un nouveau chapitre affirmant la vie », célébrant l’instant présent, même imparfait, même fragile. Les morceaux anciens n’ont pas disparu, mais ils sont transfigurés : la nostalgie se teinte d’apaisement, le psychédélisme d’un calme retrouvé. Prochet semble avoir recollé les morceaux, comme un kintsugi musical, pour composer non pas un retour, mais une renaissance.
Les voix de la lumière
La douceur n’est pas l’absence de profondeur. Sur “Memory’s Underground” ou “Daisy” (en collaboration avec El Michels Affair), l’album s’ouvre sur des arrangements luxuriants : cordes, guitares, grooves subtils, xylophones flottants, autant d’instruments qui élargissent l’espace intérieur de la musique. The Guardian décrit ces sonorités comme des ambiances pastorales, presque bucoliques, oscillant entre dream-pop, psychédélisme et références à la pop des années 90, évoquant des groupes comme Saint Étienne ou Lush.
Mais au-delà de la texture, c’est la voix de Prochet qui retient. Toujours légère, parfois fragile, souvent rêveuse, elle flotte, elle caresse, elle incante. Dans une actualité saturé de fureur sonore (coucou, le nouveau disque live de Nick Cave and the Bad Seeds qui sort le même jour), Unclouded ose la délicatesse : offrir un refuge, une respiration, un espace pour regarder la vie “sans nuages”. Le disque, comme l’explique TheArtsDesk, « features spaced out, dream pop sounds with airy, helium-tinged vocals, a shuffling groove and an orchestral backing » — « propose des sons dream-pop éthérés, des voix aériennes comme soufflées à l’hélium, un groove chaloupé et un fond orchestral ».
Cathédrale en mouvement
Unclouded n’est pas une colline paisible, mais un jardin en mouvement : les fleurs tournent, les vents passent, les ombres dansent. Certains morceaux prennent des teintes nostalgiques, d’autres des éclats solaires. L’album ne cherche pas l’unité parfaite : il embrasse l’impermanence et l’instant présent. Boomkat le résume bien : ce disque célèbre « le moment présent, quel que soit l’état dans lequel on se trouve » — “celebrates the present moment, whatever state we find ourselves in”.
Il y a dans cette musique un pari sur le sensible : accepter les fissures, les tremblements, les respirations irrégulières, et faire de ces tremblements le cœur même de l’œuvre. Ce geste, pour être modeste, n’en est pas moins radical : il rappelle que la beauté n’est pas dans la perfection, mais dans l’effleurement, un souffle, un accord, un moment suspendu.
De la brume au clair-obscur
Française, Melody Prochet a d’abord émergé en 2012 avec son premier album éponyme, produit par Tame Impala, qui imposait déjà son goût pour le psychédélisme rêveur, les guitares floutées et la voix vaporeuse. Depuis, elle a traversé des épreuves — une période d’absence, un album “perdu” (Unfold), une reconstruction personnelle et artistique. Avec Unclouded, elle semble recoller les morceaux : non pour retourner en arrière, mais pour redéfinir le présent. Elle réussit le pari compliqué de rester fidèle à son univers, rêveur, flottant, fragile, tout en affirmant une maturité nouvelle, une clarté retrouvée, une urgence douce.
Melody’s Echo Chamber : Unclouded (Domino Recording) – Sortie le 5 dĂ©cembre 2025
Concerts : 25 fĂ©vrier 2026 Ă Saint Brieuc, 26 fĂ©vrier 2026 Ă Lorient, 23 avril 2026 au Trianon (Paris), le 25 avril 2026 Ă Rouen – Infos et billeterie







